French Toast

French Toast

Si on aime interviewer les groupes qu’on apprécie, on aime aussi interviewer les acteurs de « l’ombre » du monde de la musique : tourneurs, programmateurs, organisateurs de soirées… Notre ami et chroniqueur The big Bick nous a parlé de Stephan Lipiansky, le boss du label associatif French Toast. Stephan nous parle ici de sa passion de la musique, de la situation des labels et des nouveaux projets de French Toast, dont les fameux singles numériques dont vous avez probablement entendu parler sur Facebook.

Stephan, peux-tu nous parler de ton parcours ?

Avec plaisir ! A la base je viens d’un milieu très différent de la musique puisque j’ai étudié l’économie et que je l’enseigne désormais. Je suis venu à la musique sur le tard. J’ai monté un groupe en 2003, New Pretoria, on a pas mal tourné sur Paris, sorti un ep et un album. Du coup, j’ai rencontré pas mal de groupes que je trouvais intéressants musicalement et humainement d’où l’idée de créer un collectif. French Toast est né vers 2005-2006.

Etre label manager, même d’un label associatif, ce n’est pas compliqué avec la crise du business ?

Si, c’est sûr. On avait très peu d’argent au départ et on a presque tout perdu sur quelques sorties. Mais depuis peu, je me rends compte qu’on peut aussi faire beaucoup avec très peu d’argent. Le but de notre structure, en tant qu’association sans but lucratif, est surtout de faire mieux connaître des artistes. Pour cela on a surtout besoin de temps d’énergie et de parler aux gens. C’est faisable sans argent !

Peux-tu nous expliquer le concept de french toast ? Est-ce un label ou organisateur de soirées ?

Comme je le disais, au départ c’est surtout un collectif de groupes qui se connaissaient un peu et qui avaient envie de partager une étiquette. On est devenu un label presque par accident. Quand il s’est agi de sortir l’album de New Pretoria en 2007, on avait pas vraiment de touche sérieuse. Donc j’ai décidé de faire de French Toast un label. Depuis on a sorti quelques albums (Reza, Pokett, Porco Rosso, Pierre & Marie, Mr Dame…). Mais au départ c’est vrai qu’on avait plus l’ambition d’organiser des concerts réguliers sur paris. On le fait toujours d’ailleurs !

Comment est né le concept de french toast ?

Au tout départ, avec un ami à moi, on voulait surtout faire une association qui mélange musique et cinéma. Mais la musique a pris le pas sur le reste et le fait d’avoir une association facilite les choses dans l’organisation des concerts notamment. J’ai donc décidé d’en faire profiter les groupes que je connaissais bien : Saïbu, Reza, Porco Rosso, Pierre & Marie, The Chiltons… D’où l’idée du collectif à la base. Mais dernièrement on a aussi sorti le court-métrage de Jb Fleury, « mortel rendez-vous ». On l’a d’ailleurs diffusé en première partie de plusieurs concerts à la loge en novembre dernier.

French Toast Single Vol.3

French Toast Single Vol.3

 Pas trop dur de se renouveler quand on organise des soirées mensuelles ?

Si ! Mais le but de ces soirées mensuelles c’est avant tout de mettre en avant des artistes que j’aime bien, que je connais et qui n’ont pas forcément une très grande exposition. Or à force de traîner à droite et à gauche, on fait pas mal de chouettes rencontres. Et puis, je fais jouer aussi le réseau de mes amis. Ainsi on a ainsi pu faire venir jouer des artistes américains, anglais, allemands, que les groupes du label avaient rencontrés en tournée. J’essaye aussi de suivre un peu l’actu des nouveaux groupes français et quand ça me semble chouette, je les invite volontiers.

Depuis quelques mois, tu développes des singles numériques à télécharger. Est-ce une stratégie pour faire connaître de jeunes groupes à une époque où le disque en tant qu’objet est un peu « dépassé » ?

Oui. C’est surtout que je suis un utilisateur assidu des réseaux sociaux et que je me suis rendu compte que vouloir faire écouter des albums entiers à des gens qui passent 5 minutes sur Facebook, c’était un peu illusoire. Du coup, je me suis dit que des singles, deux titres de 3-4 minutes, c’était un bon format pour ce genre de support. Et puis, l’avantage des réseaux sociaux, c’est qu’on a plein d’amis qui peuvent faire tourner. J’en ai fait le concept de ces singles. J’invite les gens à les partager en échange d’un téléchargement gratuit. C’est un outil de promotion qui se veut aussi un prétexte au partage et à l’échange. Je trouve que c’est une bonne conception de l’activité d’un tout petit label comme le nôtre.

Lors d’une interview avec denis quélard du pop in, on a constaté que la scène est aujourd’hui une priorité pour développer un groupe, beaucoup plus qu’un disque. Qu’en penses-tu ?

Ca me semble assez vrai. La scène a pris une dimension plus forte depuis une dizaine d’années. Mais ce n’est pas forcément un mieux. Il y a des artistes qui font des disques magnifiques et qui sont mauvais sur scène. Pour eux ça devient dur de se faire connaître. J’aime bien les concerts, mais je ne leur donne pas une primauté sur le travail de studio. Ce sont deux exercices différents et deux modes d’écoute de la musique qui n’ont parfois pas grand-chose à voir.

Comment vois-tu le développement de French Toast dans les mois et les années à venir ?

On va se contenter des mois, parce que je ne suis pas un pro de la vision à long terme ! Je vais continuer à sortir régulièrement des singles numériques parce que je pense vraiment que c’est ce que je peux faire de mieux en ce moment. J’aimerai bien fidéliser un auditoire et que les gens continuent à jouer le jeu en partageant comme ils l’ont fait jusqu’à présent. Par ailleurs, les soirées mensuelles continuent pour l’instant à l’international au moins jusqu’à juillet prochain. Enfin, on continue à accompagner des sorties de disques. Les prochains : un ep de Pollyanna et un album de Reza (en partenariat avec l’excellent label participatif microcultures), le tout fin avril.

Et l’évolution du business de la musique ?

Ouh là ! Le business c’est pas trop mon truc. Mais cela dit, je dois avouer que contrairement à beaucoup, je suis assez optimiste en ce qui concerne le développement de la diffusion numérique de la musique. J’ai l’impression quand même que les gens commencent à prendre une vraie habitude de consommation de la musique digitale, que ce soit via des abonnements à deezer ou spotify ou en achetant sur iTunes. Je pense que ça ne suffira pas à rendre rentable un certain nombre de projets musicaux mais à la rigueur, je m’en fous. Les gens autour de moi sont des amateurs. La musique est avant tout une passion, un hobby. Et un hobby, ça fait toujours dépenser de l’argent ! Donc, acheter des timbres de collection ou dépenser de l’argent pour enregistrer un disque, au final c’est un peu pareil.

Le mot de la fin ?

Merci beaucoup à toi de m’avoir proposé cette interview et ainsi parler un peu de french toast. Du coup j’en profite pour remercier un tout ceux qui relaient notre actu et sans qui on tomberait dans les limbes de l’oubli. Je ne vais pas les citer mais ils se reconnaitront.

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A propos de l'auteur

Créatrice de Spanky Few