AV

AV

AV, C’est un peu l’artiste qu’aurait été Alain Bashung s’il avait eu 27 ans en 2011. Il nous surprend par sa voix grave, ses paroles chiadées et des mélodies épurées mais non moins efficaces. Au pays des guitares acoustiques et des chemises à carreaux, la New Wave d’AV nous offre une bouffée d’air pure. Depuis quelques semaines, AV nous livre ses titres au compte-goutte. Les excellents Venus Bar et Plan C lui ont permis d’atteindre en un temps record le Top Noomiz de novembre. On attend avec impatience la sortie du 5 titres d’AV, produit par le talentueux Alexandre Armengol Areny. Ne doutons pas que 2012 sera une année clef pour AV avec une tournée et la sortie d’un clip réalisé par Eva E. Davier. Il nous parle aujourd’hui de son parcours, de sa relation fusionnelle avec son producteur, du Tour de France, de jazz malien et de ukulélé. Attendez-vous à une interview haute en couleur !

La plupart des gens te connaissent en tant que journaliste radio. Peux-tu nous parler de ton parcours ? Qu’est-ce-qui t’a donné envie de passer de l’autre côté du micro ? N’est-ce pas un peu une question d’égo ? 

Effectivement, j’ai débuté par la radio sur Ouï FM et SFR Music notamment. J’ai fait une école de radio parce que j’avais envie de rencontrer du monde, de sortir de ma banlieue isolée et surtout de faire un boulot en rapport avec la musique. Celle-ci a toujours été une passion pour moi, beaucoup plus que la radio. J’ai toujours eu envie de faire de la musique et ça s’est amplifié quand j’ai fait de la radio. J’ai reçu beaucoup de groupes francophones et franchement, la plupart étaient décevants. J’avais envie de mettre un bon coup de pied là-dedans en faisant quelque chose de différent parce que si on est franc, y en a plein le cul de l’ukulélé. C’est vrai qu’il y a un peu d’égo mais pas que. Le projet AV est né après ce constat, il y a plus d’un an. J’ai fait quelques concerts puis j’ai eu besoin d’une rupture, de changer d’air et je suis parti six mois à Manchester.

L’Angleterre, ça t’a ouvert des perspectives ? Tes influences se sont-elles enrichies après ces six mois ? 

Pendant ces six mois, j’ai été reporter pour Ouï FM mais comme presque tous les français qui arrivent en Angleterre, j’ai un peu galéré. J’ai travaillé quelques mois en tant que caviste et quand je suis revenu en France, je n’avais plus de boulot et plus d’argent. Ca a été une autre vie, un peu étrange… Comme de passer Noël loin de ma famille, avec des expatriés comme moi. Musicalement parlant, ça ne m’a pas trop influencé parce que j’écoutais déjà Joy Division, les Stones Roses et toute la bande de Factory. En fait je suis surtout allé en Angleterre pour les briques rouges, le ciel gris et le jus de cranberries !

Quand tu es revenu d’Angleterre, tu as repris le projet là où il en était resté. Comment ça s’est passé ? 

A mon retour, j’ai eu envie de bosser avec des gens que je connaissais. J’ai commencé à travailler avec Alice Botté, ex-guitariste de Daniel Darc, Alain Bashung et Christophe mais il travaillait sur ses propres projets et n’avait pas forcément le temps de s’investir autant que je l’aurais voulu. Je connaissais Alexandre Armengol Areny depuis longtemps et on n’était pas très proche. Mais quand on a commencé à bosser ensemble, il y a eu une vraie alchimie. Je ne peux pas vraiment expliquer ça mais travailler avec lui, c’est hyper intense (mais il n’y a rien de sexuel là-dedans, je te rassure !). On se complète parfaitement et on s’influence mutuellement sur les textes et les arrangements. Alex vient de l’électro, j’ai des références francophones et c’est ce mélange qui est intéressant.

Tu écris la plupart des paroles du 5 titres. Par quoi es-tu influencé ? Puises-tu dans tes expériences personnelles pour écrire ? Si oui, est-ce pour toi une sorte d’exutoire ? 

Je suis parolier sur tous les titres sauf sur Autostrada qui est co-écrit avec Mathieu Lescop. Je co-compose avec Philippe Thilault. J’ai demandé à plusieurs amis musiciens de m’écrire des tires mais je n’en dis pas plus pour le moment. Alex valide tous les titres car il faut qu’il ait envie de les produire. Pour écrire, je suis inspiré par les artistes que j’admire : Joy Division et la New Wave, Alain Bashung qui pour moi est le plus grand interprète francophone, Christophe et bien sûr Gainsbourg. Mais pour la plupart de mes titres, en tout cas ceux qui sont en écoute, je m’inspire des films que j’ai aimé comme ceux d’Argento, de Lynch, et de leur BO. Pour Venus Bar, c’est par exemple Twin Peaks et Julee Cruise qui m’ont beaucoup influencés. Pour Autostrada, c’est la BO de New York 97 qui nous a inspiré. Récemment, j’ai vu le film Drive et je pense qu’il aurait aussi pu m’inspirer Autostrada grâce à ses courses-poursuites dans la nuit. Pour revenir à Venus Bar, Alain Chamfort m’a aussi inspiré ce titre. A la base je l’avais écrit pour en faire un duo avec lui mais ça ne s’est pas fait. Sinon, je ne suis pas sûr que ce titre aurait pris une dimension aussi rococo, eighties. Pour les titres qui vont suivre, c’est vrai que je me suis beaucoup plus inspiré de ma vie personnelle. Ces titres sont d’ailleurs plus sombres, plus mélancoliques. On peut donc dire que c’est bien un exutoire.

On voit beaucoup de groupe qui galèrent depuis des années mais pour toi, tout semble aller très vite. C’est quelque chose que tu avais envisagé ? 

Oui, ça me fait flipper mais je l’ai cherché ! J’ai tout mis entre parenthèses pour ce projet et j’ai eu la prétention de vivre de ma musique. C’est vrai que ça va vite, j’ai beaucoup de propositions, surtout venant du milieu électro bizarrement. Ca me surprend parce que j’ai un peu de mal à situer mon projet, à savoir où me placer.

Comment et où te vois-tu dans dix ans ? 

J’ai le droit de rêver ? Alors je ne ferai jamais le même album deux fois. J’aimerais faire un album de blues malien. Sans déconner, j’adore le blues africain en particulier Ali Farka Touré et Tinariwen. Faire un disque en Afrique, c’est une expérience que j’aimerais tenter. J’aimerais aussi faire un album de Coldwave et pourquoi pas bosser un jour avec des musiciens de la French Touch de Versailles comme Rob de Phoenix dont je suis très fan. En fait, j’ai envie d’expérimenter plein de choses. Selon moi, un artiste doit toujours être à la recherche de quelque chose sinon ça n’en est pas un. Sinon j’espère que je bosserai toujours avec Alex dans dix ans.

Puisqu’on parle de futur, l’avenir de la musique tu le vois comment ? En tant qu’artiste, quelle est ta stratégie pour faire face à la crise qui touche le milieu ? 

Je pense qu’on est en phase de transition. Hier j’ai été au Virgin Megastore et le rayon disque a diminué de moitié, c’est flippant ! Il faut revoir le système en profondeur. Je pense que les opérateurs téléphoniques pourraient sponsoriser un peu plus les artistes. L’édition est aussi primordiale. Il faut se bouger le cul ! On ne sait pas trop où on va mais je suis convaincu que les artistes trouveront des solutions pour s’en sortir. Le live compte à fond et si un groupe est mauvais sur le live, qu’il ne compte pas avoir plus de trois ans de carrière. C’est pour ça que je bosse surtout le live, c’est ce qui me fait le plus peur. Se retrouver en face du public et en face des pros, c’est très angoissant.

Quelle est ton actu du moment et tes projets à venir ?

Je continue à bosser sur mon 5 titres et je prépare le live. Le titre Autostrada sortira en décembre et j’ai hâte de le faire découvrir au public. Janvier sera un mois important car ce sera la sortie du clip Venus Bar, réalisé par Eva E. Davier qui a fait un super boulot et qui a tout de suite compris ce que je voulais. D’ailleurs la grande surprise du clip est la présence de Didier Wampas, qui joue le barman du Venus Bar. Je suis ravi car j’aime beaucoup Didier Wampas avec qui je partage la passion de la musique mais aussi celle du Tour de France. J’aimerais bien sortir une version vinyle du 5 titres en mars. Et puis il va y avoir le live avec un concert au Pop’In le 7 février 2012 et plusieurs belles salles parisiennes.

AV par Sébastien Tixier / Tournage du clip Venus Bar par Eva E. Davier

AV par Sébastien Tixier / Tournage du clip Venus Bar par Eva E. Davier

A propos de l'auteur

Créatrice de Spanky Few