A l’occasion des 60 ans de la création des « grands ensembles », l’objectif de l’auteur du projet SARCELLOPOLIS, Sébastien Daycard-Heid, est d’interroger la cohésion sociale de cette ville-monde afin d’observer l’évolution de la diversité et de la banlieue en France. A cette occasion, il décline son projet autour d’un documentaire radiophonique, d’un documentaire TV et d’un film interactif diffusé sur Internet.

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La particularité de SARCELLOPOLIS réside dans le caractère transmédia du projet. S’inscrivant dans un travail sur le long terme, l’auteur et les réalisateurs ont récolté beaucoup de matériel, autant de traces pour raconter la ville différemment, via de multiples supports. Le documentaire se décline en film interactif, destiné à internet, en format TV et radio.

Rapidement, une envie a pris forme : proposer un voyage urbain qui rend hommage à la diversité des rencontres, des histoires et des sujets d’une ville foisonnante, grâce à ses communautés. Le parti pris du bus et le choix de la ligne 368 sont riches en potentialité pour réaliser cette invitation au voyage à travers un film interactif et poétique. Le bus est traité ici comme une plateforme de navigation permettant de construire une véritable expérience et une immersion dans le quotidien des Sarcellois. Le bus c’est aussi un univers urbain, visuel et graphique, doté d’une ambiance sonore. Un lieu propice à la flânerie où l’imaginaire vagabonde. Chaque arrêt est une possible rencontre, une porte ouverte sur la ville et sur la vie des « passants » que nous croisons.

Si l’approche du film interactif est d’adopter une vision panoramique, centrée sur l’immersion, le voyage et la rencontre, le documentaire TV s’attache à répondre à cette question: qu’en est-il du vivre ensemble aujourd’hui à Sarcelles, alors que cette ville était dans le passé un modèle d’intégration?

Le média radiophonique quant à lui se prête à une invitation au voyage poétique et à l’errance dans la ville. Ce format spécifique se concentre sur l’aspect sonore d’éléments qui construisent la narration: voix d’habitants, ronronnements du bus, les avions qui passent au dessus de Sarcelles, les bruits de la ville en général. Parallèlement, l’ambition est d’implanter le projet sur le territoire sarcellois. Une exposition locale est imaginée, présentant les films et photographies réalisés durant la durée du projet. L’idée consiste à inviter les habitants à contribuer à cette exposition en collectant écrits, photographies, films… l’objectif étant de créer un événement collectif et collaboratif.

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A l’origine, SARCELLOPOLIS est un projet commencé au foyer de jeunes travailleurs pour la commande d’un livre consacré à Jacques Windenberger. Ce photographe des années 60 a documenté ce qui fut la construction du premier grand ensemble, pensé par de grands urbanistes et politiques. En décalage par rapport aux discours des medias de son époque, l’écrivain Marc Bernard décidait alors d’habiter à Sarcelles et balayait certains mythes comme la Sarcellite, maladie imaginée des grands ensembles. Considérée au début comme une banlieue, Sarcelles fut un refuge conçu pour héberger les réfugiés, rapatriés ou travailleurs venus d’horizons différents. D’emblée, j’ai été frappé par l’esprit pionnier qui se dégageait de ces photos. Elles montraient que ce lieu d’une diversité extraordinaire, cette ville-monde, fut un tremplin pour les personnes issues de l’immigration, et finalement la plus belle réussite de notre modèle républicain d’intégration.

C’est ainsi que l’envie de documenter cet espace est née pour rendre hommage à une ville complexe, loin des clichés que les médias ont calqué sur elle durant des décennies et pour prendre le pouls d’une ville laboratoire. Ce projet documentaire porte un regard plutôt positif sur le bilan des grands ensembles en détaillant les réalités quotidiennes des habitants de Sarcelles. Le « vivre ensemble » est encore une réalité. Cependant, il tend à disparaître du fait d’un modèle de société qui a changé et d’une architecture en mutation : les quartiers résidentiels remplacent les barres d’immeubles, les habitants se côtoient moins et la fierté d’appartenance à la ville est en péril. Mais ces évolutions du modèle sarcellois n’entament pas l’amour que les gens ont pour leur ville.

A la rencontre de ses habitants et à travers le recueil de nombreux témoignages, j‘ai ainsi pu couvrir toutes les thématiques liées à la cohésion sociale et à l’égalité des chances : l’identité, l’école, la communauté, l’insertion, la rénovation urbaine, la religion, etc. D’une utopie politique à la confrontation d’une réalité documentaire, le projet SARCELLOPOLIS explore la ville, questionne les générations pour proposer une véritable réflexion autour de ce laboratoire de la République qu’incarne Sarcelles.

Sébastien Daycard-Heid

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SARCELLOPOLIS, un projet transmédia co-réalisé par Sebastien Daycard Heid et Bertrand Dévé, produit par François Cusset (Yes Sir Films).

– Le webdoc est sélectionné au festival I Love Transmedia de la Gaîté Lyrique du 1er au 4 octobre
– Le documentaire TV de 52 minutes sera diffusé sur France 3 IDF le 17 octobre à 15h20, et suivi d’un débat de 26 minutes avec les habitants de Sarcelles
– Une version radiophonique sera également diffusée sur France Culture le 7 octobre dans l’émission « Sur les docks ».

Crédits photos : Cédric Faimali/Yes Sir Films

A propos de l'auteur

Créatrice de Spanky Few